
Séance ciné : Minecraft
Le quotidien avec un enfant neuroatypique, en particulier un enfant autiste, c’est souvent un parcours semé d’embûches, une sorte de quête épique dans laquelle il faut être à la fois guide, compagnon, et témoin. Et quand on est soi-même parent autiste, ce parcours prend une dimension encore plus intense. Ces petites aventures quotidiennes, qu’on pourrait parfois minimiser, prennent une toute autre ampleur.
Aujourd’hui, je vous parle de notre dernière sortie cinéma… une véritable épopée, tant pour Léon que pour moi !
Tout a commencé avec la question de notre neuropsy, spécialisée en TCC pour l’autisme : « C’est quoi tes passions, Léon ? » La réponse : le gaming. Et c’est ainsi qu’elle lui a parlé du film Minecraft qui passait au cinéma. Léon était ravi ! Le film, c’était bien plus qu’un simple film ; c’était l’occasion pour lui de vivre un moment qui parlait son langage, qui nourrissait sa passion. Alors, bien entendu, j’ai proposé d’aller le voir ensemble. Elena était en vacances avec son père, et ce moment semblait parfait pour une sortie en tête-à-tête avec mon petit bonhomme.
Un début d’aventure semé d’embûches
Notre séance était prévue à 16h. Mais c’était sans compter sur les travaux dans Guéret, qui rendent l’accès au centre-ville un vrai casse-tête. Je me suis retrouvée à tourner en rond pour trouver une place de parking et ai fini par me garer place Bonnyaud. Léon commençait à faire des écholalies… Le temps de courir jusqu’au cinéma (après avoir fait la queue au parcmètre), nous sommes arrivés avec 10 minutes de retard. Pour ceux qui me connaissent, vous savez que je déteste être en retard ! Léon déteste aussi ça, et rater le début du film était un petit coup au moral pour lui.
Bien sûr, même en retard, impossible de ne pas prendre de pop-corn. Ces fameux pop-corn du cinéma (déjà raté au cirque… ) sont un incontournable. Je les ai commandés en vitesse, pendant que je courais aux toilettes, laissant Léon seul avec la dame pour récupérer la commande. Il a pris sur lui pour parler à la dame pour payer avec ses sous.
Entrée dans la salle : une première victoire
Arrivés dans la salle, à cause de notre retard, nous avons dû entrer dans une salle complètement plongée dans le noir et trouver une place sans déranger les spectateurs déjà installés. C’était encore une situation difficile pour Léon, car il déteste les imprévus, et plus encore déranger les autres. Heureusement, à Guéret, la salle était plutôt vide, peut-être une dizaine de personnes seulement, et nous avons rapidement trouvé notre place sans trop de stress. Bon, on aurait aimé se placer au milieu : on aime être face à l’écran. Mais, là, heu, ça nous demandait trop… On s’est mis sur des sièges en bordure de l’allée. Léon était un peu renfrogné, mais est vite rentré dans le film.
Léon était à fond dans le film ! Il était ravi de pouvoir commenter et m’expliquer tout ce qu’il savait sur le jeu Minecraft, en lien avec le film. C’était un moment magique où je pouvais voir sa passion et son enthousiasme.
Quand une petite crise devient une grande épreuve émotionnelle
En plein milieu du film, le drame : une peau de pop-corn s’est coincée au fond de la gorge de Léon. Une petite chose insignifiante pour certains, mais pour lui, un véritable cauchemar sensoriel et émotionnel. Une crise a éclaté instantanément. Il a commencé à paniquer, crier, cracher, trembler et avant que je puisse réagir, il a fini par vomir dans ma main et un peu sur lui. Les cris, la panique et l’incompréhension ont envahi son corps.
Je l’ai pris en urgence, l’ai emmené dans les toilettes et, après lui avoir donné un peu d’eau, la peau de pop-corn s’est enfin décoincée. Mais la crise ne s’est pas arrêtée là. Léon déteste vomir, déteste même l’idée de vomir ou d’avoir des éclaboussures sur lui. C’est un véritable déclencheur pour une crise encore plus forte, liée à la perte de contrôle, au dégoût et à l’incompréhension de ce qui vient de se passer. Tout était amplifié par la situation nouvelle du cinéma et la surcharge sensorielle liée à l’environnement.
Je l’ai nettoyé, apaisé autant que possible dans les toilettes du cinéma. “Maman, c’est la pire journée de ma vie”, m’a-t-il dit, ce qui n’était pas vraiment une surprise, car il me le dit souvent dans des situations de crise, même si je sais que ce n’est pas la réalité. Pour lui, c’est juste un moyen d’exprimer qu’il ne comprend pas ce qui se passe et que cela le dépasse.
Retour dans la salle : un retour à la réalité douce
Même après cet incident, Léon n’était pas totalement rétabli. Il était encore en légère crise, se disant qu’il “ratait le film”. Nous avons pris une grande respiration ensemble, et je lui ai dit que nous pouvions toujours profiter du film (on a dû rater 5 minutes). Il a accepté de retourner dans la salle, mais il est resté un moment dans sa bulle, refusant tout contact, renfrogné dans son siège. Petit à petit, il s’est détendu et est entré à nouveau dans le film. Hé, c’est Minecraft, quand même !!!
Et à la fin…
Dans la voiture, il m’a dit “désolé, maman, pour tes mains… tu sais le truc que j’ai fais… Comment tu fais toi pour pas vomir ?” Léon déteste dire le mot “vomi”, car rien que de le dire, il a envie de vomir. Du coup, on a rigolé : “Comment tu feras quand tu seras grand et que ton enfant vomira dans tes mains ?” – “Ahhh non… sinon, après je vomis sur mon enfant !!!”.
Ce soir, après cette épopée, Léon m’a dit avec un petit sourire : “C’était le moyen jour de ma vie.”
Conclusion : quand chaque sortie est une victoire
Faire une sortie au cinéma avec un enfant autiste n’est jamais simplement “aller voir un film”. C’est une aventure, une série de petites victoires sur les imprévus, les émotions, et la gestion des crises.
Parfois, ces moments ne ressemblent pas à la sortie parfaite. Mais pour nous, c’est ça qui est précieux. Ces moments de relation vraie, de complicité, d’acceptation, et, surtout, de présence. Parce qu’au final, ce qui reste, c’est l’amour et la compréhension mutuelle.

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